She can kick your ass and still look good enough to sass ( Irina)

La drogue a déjà coulé dans ses veines, accrochée à son âme, elle fut dépendante de son utilisation à ses frais. L’alcool s’y prêtait bien, un bon cocktail dangereux brûlant dans son corps, l’évadant de cette vie qu’elle n’avait jamais désirée. Tiens-toi droit, ne montre pas tes dents lorsque tu souris, tu es la fille d’un soldat alors comporte toi comme tel. Ces phrases ne cessaient pas, tournant dans sa tête tel une mélodie mortuaire, une ombre constamment attachée à sa peau l’empêchant de respirer. Non, hors de question, jamais de la vie, rêve toujours puisque cela n’arrivera pas. Les portes fermées, les refus, la rigidité d’un monde dans lequel vous étiez plus un esclave qu’un enfant voulant se découvrir. Sans but, errante, alors que la seule autre option était de devenir un soldat aux ordres d’un père qui ne la comprenait simplement pas. Élevée dans un milieu strict, elle n’avait rien connu de cette liberté, sa seule évasion se faisant au prix de sa jeunesse ainsi que de son innocence. Elle stimulait sa tristesse au bout de cette sale drogue, devenant impulsive-dangereuse même-, créant une carapace autour de sa personne afin de se protéger des émotions qu’elle ne voulait plus percevoir. Son père aurait pu la laisser dans cet état misérable, dansante d’une main agile en frôlant la mort squelettique qui l’accueillerait bientôt dans son domaine, mais il décidait de sauver son sang à tout prix. Il lui arrachait donc cette fausse vie qu’elle s’était trouvée dans une échappatoire morbide, l’envoyant dans une école réputée avec l’espoir secret qu’elle y trouve la motivation d’y sauver son âme.

Le pire fut le jugement d’autrui, ces sales rapaces qui jacassaient à son passage, comme si elle ne les entendait pas. Elle n’a pas sa place ici, elle n’est là que grâce à son père, elle n’a rien de plus que nous. Oh la rage bouillait, la fumée dansante d’une énergie meurtrière, l’adolescente refusant qu’on l’étiquette si banalement à cause de ses choix de vie. Own it, spin it, deal with it. Ils allaient vite regretter d’avoir bavardés contre elle, la jeune femme refluant sa rage dans le sport contact, trouvant sa voie au sein de ce monde contre toutes les attentes. La rebelle se délectait des voix basses dans son dos, signe d’un succès, car plus on nous hait mieux on réussit.  C’était peut-être les racines russes compétitrices, peut-être son propre caractère se forgeant enfin dans la victoire, mais elle adorait être première de classe. Il n’y avait rien de plus satisfaisant que de ne pas donner raison à ceux qui n’avaient pas cru en vous. Facile vous me direz, mais c’était plus compliqué que cela ne pouvait s’avérer. Charlatane, non, mais bonne comédienne elle dissimulait les multiples émotions flamboyant sa peau. Une véritable mascarade, alors qu’elle passait son temps à frapper dans un sac de sable afin de faire sortir le venin la traversant tel l’océan, laissant écoulée la haine de cette jeunesse ratée dans la force physique qu’elle acquérait. Vous pensez que c’était facile de ne plus toucher aux dépendances qu’elle s’était créée? Toxicomane dans l’âme, vous n’étiez jamais guéri, uniquement abstinent dans l’absolution qui ne viendrait jamais à votre porte. Alors Irina concentrait tous ses efforts dans cette voie qu’elle avait découverte, cette envie de devenir quelqu’un dont ses parents pourraient être fier ne serait-ce qu’un minimum, afin de calmer ses envies de déraper. Les mauvaises langues pouvaient bavarder autant qu’elles le voulaient, la rousse ne s’arrêterait pas de respirer pour eux, elle continuerait jusqu’à ce qu’on lui arrache sa liberté de force.

Et les Androïdes dans tout ça? Irina n’en avait jamais possédée, elle les voyait comme des véritables humains, ne comprenant pas tant la différence entre eux et son espèce. Même avant les déviances, même avant les mouvements de masse pro-déviant, lorsqu’elle voyait un androïde se faire pousser au sol par un groupe de chômeur en colère elle s’en mêlait. C’était une injustice qu’elle comptait répondre avec la justice même. Elle n’hésitait pas une seconde, poussant les êtres humains fautifs de la même façon qu’ils osaient traités ce qu’ils surnommaient une ‘’fucking machine’’, usant de la même force de détermination. Pourtant elle était encore jeune, elle ne pouvait pas non plus se montrer fière devant toute la ville, alors elle agissait un peu comme une héroïne discrète dans les débuts. Pro-déviant, parce qu’à ses yeux ils étaient comme elle, parce que si ce n’était que d’elle ils seraient tous libres dès l’instant où elle avait découvert leur existence. Ils pouvaient ressentir l’envie d’être libre, d’aimer, haïr, alors ils étaient tout aussi humains qu’elle. Ce n’est pas tout le monde qui était d’accord avec ce courant de pensée, certains de la vieille école voyant les androïdes comme de simple esclave qui n’avaient pas le droit à se dire égaux aux humains, faisant des réflexions rappelant l’esclavagisme d’il y avait moins de deux siècles. La race humaine oubliait vite ses fautes, selon la russe ils avaient la fâcheuse tendance à répéter l’histoire, à adorer la violence et la position de pouvoir que leurs donnaient la possession d’une des créations de Cyberlife.

« Attend, Irina, tu ne vas quand même pas me dire qu’ils ont les mêmes droits que nous? Tu as vu ce qu’ils font en ville ces tas de ferrailles? » disait un de ses camarades de classe d’une voix terriblement arrogante.

« Carlos, ils marchent en ville pacifiquement, tu appelles ça comment toi si ce n’est qu’une manifestation paisible pour des droits qu’ils devraient avoir acquis de toute manière? » répondait-elle en laçant sa pomme sur lui, coup de bol, il se la prit en pleine figure.

« Pacifique? Ouais et demain ils vont faire exploser Detroit! Puis de quel culot ils demandent des droits, ce sont des machines, ils sont artificiels, ce qu’ils ressentent ce n’est qu’un code qui leur indique! » continuait-il en bougonnant, frottant son front du désagrément.

« Quand on t’enlèvera le droit d’exister, ta liberté, tes droits d’avoir un avenir, alors reviens me dire la même chose. » manifestait la russe à voix haute dans la cafétéria en quittant dans un nuage de colère. Irina ne comprenait pas comment certains ne pouvaient pas voir la vie tel qu’elle la percevait, c’était inconcevable que de croire que l’on pouvait être aussi aveugle à la cause des androïdes. Alors elle n’avait pas d’autres choix, elle devait se battre pour eux, affirmer haut et fort sa position. Si personne ne le faisait alors qui d’autres qu’elle pour soulever les doutes ne serait-ce que dans son cercle privé de classe. Jeter une pierre dans la rivière peut avoir plus de conséquence que l’on ne pourrait le croire.

Finir major de sa promotion cela avait eu le don de tourner quelques têtes. La rebelle n’en croyait tout de même pas ses yeux lorsqu’elle regardait son vécu, son passé encore si récent, l’évolution la surprenait elle-même. La jeune toxicomane s’était remise sur pied en l’espace de quelques années, affichant des épaules droites, un regard perturbant dans la flamme qui y dansait. Son père avait montré sa fierté pour une fois dans son existence, la prenant dans ses bras, la félicitant pour ses efforts ce qui avait eu le don de cambrer les lèvres de la jeune femme. Diplômée, compétente, elle sortait de l’école et se dirigeait directement dans son domaine de prédilection. Il n’y avait qu’une seule option valable dans son esprit et c’était celle de rejoindre les rangs de la BPAP. C’était dans la même détermination infaillible qu’elle rejoindrait leurs rangs, fervente admiratrice du lieutenant Anderson, elle ne comptait pas décevoir quiconque avec cette nouvelle position professionnelle.

Et sa vie privée dans tout ça? Elle n’en parlait pas souvent, elle n’y pensait pas souvent non plus, sa vie ne tournant qu’autour de cette carrière qu’elle avait saisi dans ses doigts agiles. Passer de l’archétype de l’adolescente troublée à celle de la policière réussit n’avait pas été de tout repos. Elle n’avait pas fréquenté d’hommes depuis ses jeunes années de débauches, se contentant de ne vivre que pour un rêve, que pour cette rage qu’elle savait détenir. Frôlant du bout des doigts, la peau délicate ainsi qu’embrasée, elle avait saisi le bras d’un de ses collègues dans le plus grand des secrets. Ses lèvres s’étaient habituées au gout de sa chaire, frissonnante dans la pénombre nuptiale au bout de sa force, alors que l’interdit se faisait tentant. La russe ne voyait pas loin dans l’avenir, elle se croyait déjà morte de par ses convictions, mais pour le temps qu’elle vivrait elle voulait crier son nom quelques nuits supplémentaires. Alors, oui, la vie privée était compliquée tandis que les émotions multiples se chamboulaient à l’intérieur de son être. Entre sa carrière, son béguin & ses envies, il n’y avait pas vraiment de place pour une vie de famille banale. Puis, la rebelle n’avait jamais été faite pour cette vie tranquille que l’on pouvait prévoir du début à la fin, l’inattendu faisait partie de son vocabulaire. Un destin imprévisible pour une femme tout aussi énigmatique, voilà qui lui plaisait bien plus que de devenir ''madame tout le monde''.